De la morale en politique
On aurait plutôt tendance à vouloir rigoler quand on entend l’association des mots « morale » et « politique » mais il faut admettre que les politiciens et les journalistes en parlent de plus en plus et de plus en plus sérieusement. Donc on est obligé de prendre ça au sérieux.
Personnellement, je suis surpris d’entendre politiciens et journalistes brandir la « morale ». Je pensais que la morale était un carcan issu de la bourgeoisie patriarcale raciste chrétienne et qu’elle était battue en brèche depuis 40 ans par tous les progressistes qui se respectent.Mais en fait, je finis par me rendre compte qu’il n’existe pas une morale mais des morales. Et c’est là que tout le concept de morale en politique commence à me poser problème.
Qu’est-ce que la morale? J’en ai assez longuement parlé avec mon père pendant un voyage, il y a quelques jours et on a eu du mal à la définir. J’ai donc regardé la définition du dictionnaire Larousse qui dit: « Ensemble de règles de conduite, considérées comme bonnes de façon absolue ou découlant d’une certaine conception de la vie. »
Ne serait-ce qu’en lisant cette définition, quand j’entends parler de morale en politique ou de cours de morale en classe, je saute au plafond ou je commence à avoir des sueurs froides, au choix. Selon cette définition, la source des règles de bonne conduite est soit une vérité absolue, soit une certaine conception de la vie.
La dernière fois que j’ai vérifié, la laïcité est l’un des fondements de notre République. Il ne saurait donc être question d’appliquer à la vie politique française un ensemble de règles de conduite issues d’une vérité absolue qui, par nature, est religieuse, qu’elle soit déiste ou pas. En République laïque, il n’y a pas de vérité absolue que l’on juge bonne par un quelconque système de croyances ou de valeurs et que l’on impose à tout le monde. Il ne doit exister que des lois sur lesquelles les représentants du peuple se sont mis d’accord. Il n’y a pas de jugement de valeur de préceptes absolus, il n’existe que des lois proposées, débattues et choisies et auxquelles nous nous soumettons par volonté citoyenne, parce que nous avons décidé de vivre dans cette communauté nationale.
Quant à « une certaine conception de la vie », cela tombe aussi sous le coup de la laïcité. Au niveau de la République, il ne saurait être question de conception uniforme de la vie mais d’un contrat de société librement consenti entre les citoyens. J’ai ma conception de la vie, vous avez la votre, chacun a la sienne et nous faisons nos choix politiques certes en fonction de cette conception mais c’est justement la confrontation de nos différents choix politiques qui aboutit à un contrat de société. Associé au principe de laïcité, qui garantit que les institutions républicaines n’obéissent pas à une église ou à un système de croyances, la multiplicité de nos conceptions de vie et des choix politiques que nous faisons, en tant que citoyens libres et égaux en droits, est justement la protection de chacun de nous contre la dictature d’une conception de la vie sur d’autres.
Donc quand j’entends les politiciens opposer la « morale » à la « légalité » ou parler de « moralisation de la vie publique », en effet, des sueurs froides m’humectent le dos!
De quelle morale parlent-ils? Selon quel ensemble de règles jugées absolument bonnes ou représentant quelle conception de la vie veulent-ils « moraliser la vie publique »?
Visiblement, il ne s’agit pas de la « morale judéo-chrétienne », battue en brèche depuis 40 ans, politiquement combattue lors de débats sur l’avortement, l’euthanasie ou le mariage homosexuel et régulièrement ridiculisée lorsqu’elle tente de s’exprimer dans la sphère politique! L’expression de la foi catholique d’un candidat à la présidentielle, dont l’un des crimes est d’être soutenu par des organisations catholiques, ou la bonne prestation du président du parti chrétien-démocrate, ont passablement inquiété les journalistes. Libération titrait, par exemple, il y a quelques mois: « Au secours, Jésus revient ». Les politiciens ne sont pas en reste, Bayrou par exemple s’inquiétant de l’expression de foi de Fillon. Même l’anti-religieux Mélenchon a été critiqué pour avoir accordé une interview à l’hebdomadaire catholique « Famille Chrétienne »!
Vous ne comprenez pas ce que cet article vient faire dans un site à propos d’Israël et pourtant, il y a toute sa place puisque l’antisionisme est un des volets occultes de la déchristianisation des sociétés occidentales et donc du combat contre la morale judéo-chrétienne. J’ai souvent dit qu’Israël est haï par tous ceux qui refusent l’idée du Dieu judéo-chrétien, même s’il est bien plus grand que cette définition. Israël et l’existence même, à travers les siècles d’une nation d’Israël, communément appelé « les Juifs », est un rappel lancinant et insupportable qu’il existe une probabilité non-négligeable que la Bible dise la vérité, donc que Dieu existe et qu’on ne peut pas simplement le nier ou le contourner. Pour symboliser cela, je dis souvent que la France fait référence à Napoléon, Louis XIV, Hugues Capet et Clovis quand le peuple d’Israël fait référence à Ezechias, David, Josué et Moïse, des « hommes de Dieu », dont l’histoire est dans la Bible. Quiconque veut tuer la morale et la culture judéo-chrétienne doit tuer ses origines et donc surtout ses représentants visibles. Il faut donc décrédibiliser et ridiculiser la Bible et délégitimer Israël.
Pourtant, nombre sont ceux qui parlent de « moralisation » de la vie publique alors même qu’ils condamnent l’expression publique de la foi ou l’activisme d’associations proches de l’Eglise ou de mouvements religieux. Il ne s’agit donc clairement pas de la morale judéo-chrétienne que l’on chercherait à nouveau à imposer à la vie politique française.
Alors de quelle morale parle-t’on? Selon quelle morale les parlementaires n’ont-ils pas le droit d’employer leurs épouses ou membres de leur famille alors que la loi le permet? Selon quelle morale les revenus des dirigeants d’entreprise doit-elle être modérée si la loi ne prévoit pas de modération? Selon quelle morale n’a-t’on pas le droit d’exprimer telle ou telle opinion politique, sociétale, historique ou même raciste?
Je pose ouvertement la question et laisse à chacun le soin d’y apporter sa réponse. Puisqu’on rejette la morale judéo-chrétienne et qu’on applique la laïcité en République Française, quelle morale essaie t’on de nous imposer et de nous faire pratiquer depuis quelque temps?
Je le pense: il n’y a pas que l’extrémisme religieux qui pose un défi à la laïcité républicaine. La nouvelle « morale », très inspirée de valeurs de « l’humanisme » de gauche et qui n’hésite d’ailleurs pas à piquer au christianisme ce qui l’intéresse, comme Ségolène Royal en 2007 et son « Aimons-nous les uns les autres », est clairement un danger pour la laïcité et pour la liberté de conscience des citoyens français. Il faut l’affirmer et le revendiquer, le principe de laïcité garantit aux français le droit de croire en ce qu’ils veulent mais aussi de ne pas croire et de ne se voir imposer aucune forme de religion, déiste ou politique.
J’ai donc parfaitement le droit, de par la loi française, de rejeter la « novmorale » aux racines idéologiques troubles que l’on cherche à m’imposer en remplacement de ma propre et individuelle morale chrétienne.
Non, je ne veux certainement pas de morale en politique ou dans l’espace public, ni chrétienne ni autre. Je veux un Etat de Droit, de l’égalité en Droit (qui s’appliquerait donc aussi aux énarques, haut fonctionnaires et politiciens) et du respect de la Loi. C’est toute la nuance!
Pug