Du rôle des modérés

Interpellés et invités à se positionner clairement contre le Djihadisme et l’Islam Radical, beaucoup de musulmans refusent de prendre position en disant que les djihadistes et salafistes ne représentent pas l’Islam et qu’ils n’ont donc pas à se positionner par rapport à quelque chose d’étranger à l’Islam.

Disons les choses le plus franchement possible : cette posture est d’une hypocrisie sans nom et participe à l’ambiguïté qui mène aux amalgames que, pourtant, ces mêmes musulmans dénoncent.

Les publications, vidéos et discours des Djihadistes et des chefs de l’Etat Islamique, comme d’autres groupes terroristes islamistes sont structurés de versets du Coran, de passages des Hadiths, d’exemples tirés de la biographie de Mahomet et d’exégèses de grands savants de l’Islam. Ces musulmans radicaux, à leur tour, prétendent que les musulmans modérés ne représentent pas l’Islam et peuvent donc être la cible des attaques des vrais musulmans.

Qui donc croire, dans cet affrontement théologique influencé par le contexte où vit chacun des contradicteurs ? Et dans ces conditions, sommes-nous fondés pour réclamer des musulmans modérés qu’ils s’expriment et agissent contre ceux qu’ils estiment être des faux musulmans, voire des blasphémateurs ?

Pour répondre à cette question, je vais encore prendre comme référence Israël et le peuple Juif, en trois exemples qui établissent, à mon avis, une norme de comportement face aux extrémistes.

-Le 12 Janvier 1942, Avraham Stern, chef du Lohamei Herut LeIsrael ou Lehi, aussi appelé Groupe Stern, est abattu par l’armée britannique à Tel Aviv. Son groupe, extrémiste au point de vouloir s’allier avec l’Allemagne Nazie contre les Britanniques, est totalement isolé et rejeté par la communauté juive de Palestine. Même l’organisation terroriste de l’Irgoun a consenti à un cessez-le-feu avec les Britanniques au nom de la lutte contre les Nazis. D’après plusieurs sources, il est plus que probable que Stern a été « donné » aux Britanniques par la Haganah, l’armée secrète juive, sans doute sur renseignements provenant de l’Irgoun qui le connaissait bien.

-En 1946, à la tête du groupe Berih’ah qui évacue des Juifs vers la Palestine, Abba Kovner fomente deux attentats de vengeance de la Shoah. Le premier consiste à empoisonner le circuit de distribution d’eau de Nuremberg, Hambourg et Munich et le second consiste à empoisonner la nourriture du camp de Dachau où les officiers SS sont détenus par les Américains. Le second attentat parvient à être mis en oeuvre par dispersion d’arsenic dans la boulangerie du camp. 2200 officiers SS tombent malades mais aucun ne décède. Pour le premier, de bien plus grande ampleur, Kovner se rend en Palestine pour rencontrer des chimistes juifs et obtenir une quantité suffisante de poison. Mais dans le navire qui le ramène en Europe, Kovner est arrêté par les Britanniques et emprisonné. Un de ses complices jette le poison à la mer. On sait aujourd’hui que c’est la Haganah, l’armée secrète juive, qui a « donné » Kovner aux Britanniques, craignant que son extrémisme meurtrier ne desserve la cause d’Israël.

-Le 22 Juin 1948, le cargo panaméen « Altalena », chargé d’immigrants et surtout d’armes à destination de l’Irgoun, est attaqué, incendié et coulé par Tsahal. A la création de l’Etat d’Israël, le 15 mai 1948, toutes les forces combattantes juives, Haganah, Palmach, Irgoun et Lehi sont fusionnées pour former Tsva Hagana LeIsrael, les forces de défense d’Israël, dont Tsahal est l’acronyme. Mais les chefs de l’Irgoun entendent conserver une autonomie opérationnelle, qu’ils dirigeraient à leur guise. Échaudés par l’affaire de Deir Yassin où l’Irgoun a montré ses limites militaires en combat conventionnel et surtout son indiscipline opérationnelle, Tsahal refuse catégoriquement cette indépendance de l’Irgoun. Face au refus de l’Irgoun de remettre les armes de l’Altalena à Tsahal, le Premier Ministre David Ben Gourion donne l’ordre de détruire le cargo.

Ces trois exemples montrent clairement que les Sionistes, confrontés à l’extrémisme de leur propre camp, n’hésitent pas à faire ce qu’il faut pour ramener l’ordre.

Les musulmans doivent-ils suivre cet exemple ? La réponse à cette question leur appartient.

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