Un Pearl Harbor électoral ?
Réaction aux élections régionales d’hier 6 décembre 2015, veille de l’anniversaire de l’attaque japonaise sur Pearl Harbor, le 7 décembre 1941.
Je ne suis certainement pas surpris ni catastrophé. Il suffisait d’écouter les divers avis autour de soi pour voir les choses venir.
Aujourd’hui, si dans votre entourage, vous n’avez réellement personne qui envisage de voter FN et le dit, c’est que vous êtes entouré d’un certain nombre de menteurs ou que vous vivez dans un cercle idéologique très fermé. Et si vous êtes encore surpris quand des amis ou membres de votre famille vous disent qu’il vont voter FN, ce n’est pas eux le problème, c’est vous.
Les journaux, demain, vont titrer « Le Choc », comme si personne ne le voyait venir ni s’y attendait. La mine déconfite des politiciens, les discours « solennels » des chefs de partis qui appellent à entrer en résistance, les journalistes qui tentent de comprendre comment on en est arrivé là, tout ça ne pose qu’un seul gros constat : les soi-disant élites et détenteurs des pouvoirs en France, et vous si vous partagez leur surprise, sont complètement déconnectés de ce qui se passe réellement. Certains politiciens le savent et le disent eux-mêmes !
Personnellement, je côtoie des personnes d’horizons très divers, armée, police, santé, fonction publique, entreprises de tourisme, associations, etc, et ma carrière chaotique a eu l’avantage de me faire voir de nombreux secteurs d’activité différents. Je ne suis absolument pas surpris de ce qui arrive. C’était prévisible depuis déjà longtemps et tous les signaux sont au rouge depuis encore plus longtemps.
Ce qui me navre et m’interpelle, c’est de voir des gens qui ont, au fond, les mêmes valeurs que les miennes, qui sont à des années-lumière d’être des fascistes, des racistes ou des nationalistes, m’annoncer que par dépit, exaspération, colère ou une volonté de créer un choc salutaire, ils voteront FN. C’est ce décalage sidérant entre d’une part, des gens aux valeurs saines qui veulent juste vivre leur vie et assurer le bonheur de leurs enfants et d’autre part, le choix électoral qu’ils déclarent vouloir faire, qui est fondamentalement triste.
Je ne leur jette pas la pierre. En parlant avec eux, en écoutant leurs conditions de travail, notamment les professionnels de santé, les chefs d’entreprises ou les policiers, en écoutant leurs peurs pour leurs enfants et pour leurs emprunts à rembourser, et en entendant comme un cri du coeur leur désespoir désabusé et amer face aux atermoiements des interlocuteurs administratifs, politiques mais aussi de leur encadrement professionnel, je ne peux que comprendre leurs attentes et leur déception consécutive. Nous sommes tous dans le même bateau. Le drame, chacun le sait et le dit avec le même ton d’exaspération, est qu’il n’y a plus d’autre choix. Les partis traditionnels ne répondent plus aux réalités de la vie quotidienne et quand ils le font, c’est avec une mentalité d’apothicaire alchimiste du moyen-âge qui applique un onguent sans rien comprendre à ce qu’il fait mais étant persuadé qu’il est un génie. Pris dans leurs idéologies politiques, leurs rêves de société et leurs références intellectuelles, les théoriciens de la politique française du XXIème siècle essaient désespérément de faire correspondre leurs idées à la réalité. Il me semble d’ailleurs qu’ils préfèrent adapter la réalité à leurs idées plutôt qu’adapter leurs idées à la réalité.
Quelque soit la couleur politique, on ne sort pas de ce drame. Les théoriciens essaient tous d’ouvrir leurs programmes politiques aux idées nouvelles et à une forme de participation des citoyens mais la situation est tellement gangrenée, les griefs sont si lourds et surtout, les idées nouvelles sont en si frontale contradiction avec les principes fondateurs de leurs idéologies qu’elles passent le plus souvent à la trappe. Du coup, comme tout bon charlatan scientifique ou religieux, face à l’échec systématique de leurs idées, ils fustigent le manque de foi de leurs victimes et invoquent, larmoyants et pleurnichards des références idéologiques décédées il y a un siècle pour ceux qui parlent de Jaurès ou déjà presque un demi-siècle pour ceux qui parlent de De Gaulle. Alors, au bout de tant d’années de charlatans alchimistes de la politique qui promettent toujours des choses irréalisables, souvent illogiques et parfois complètement privées de raison et n’assument jamais les catastrophes et la longue agonie dans laquelle ils nous entraînent, faut-il vraiment s’étouffer de surprise lorsque nos concitoyens, pourtant des gens bien sous tout rapport, qui ne cassent pas du nègre, qui ne discriminent pas les homos, qui bossent tous les jours avec des musulmans et qui aiment leur pays sans en haïr d’autres, décident de voter Front National ?
Non, pas de surprise. Mais consternation, absolument… et là, je rejoins mon sujet favori : la défense d’Israël.
Je ne suis pas consterné par jugement moral hautain et snob envers les électeurs du Front National. Je suis consterné de constater que la seule force politique qui semble en mesure de secouer l’arbre mort de la politique française ait un programme économique et social aussi profondément dramatique et je suis consterné de constater que si peu s’en rendent compte. Je suis consterné de voir que si peu lisent réellement les programmes et je suis consterné de me rendre compte que si peu, parmi nous, ont la capacité de comprendre pourquoi le Front National est si dangereux pour la France, non pas seulement pour son côté xénophobe mais pour ses options économiques qui ne feraient qu’aggraver la létalité des potions alchimistes que ces nouveaux apothicaires « lavant plus blanc que blanc » s’apprêtent à nous servir, au nom d’une référence idéologique, Jeanne d’Arc, morte il y a 5 siècles !
Pourquoi si peu s’en rendent compte ? Parce que, comme sur le sujet d’Israël, trop peu ont la possibilité de se documenter, de réfléchir, d’étudier, de lire, de comparer. Comme pour Israël, on s’en remet alors à de « grands noms », on lit quelques articles dans la presse, on regarde un ou deux débat et on se forge une opinion ridiculement pauvre et intellectuellement atrophiée, tout en étant persuadé de comprendre les tenants et aboutissants et en exprimant cette opinion avec autant d’aplomb que de vide documentaire. Pourquoi autant de gens pensent que le Front National peut être une solution, sans y croire vraiment ? Pour les mêmes raisons, à peu de choses près, qu’ils pensent que l’Etat Palestinien est la solution au conflit Israélo-Arabe, sans y croire vraiment. Par absence de réflexion et défaut d’étude. Par absence du travail minimum que nécessite la responsabilité d’être un citoyen d’une démocratie qui prend au pied de la lettre la notion de pouvoir au peuple. Est-il concevable qu’un ministre prenne des décisions sans un minimum de connaissances de base, sans avoir étudié le dossier, sans avoir écouté différents avis et sans avoir mûrement réfléchi ? Non. Il n’est pas davantage concevable qu’un citoyen aille voter sans avoir un minimum de connaissances de base, sans avoir étudié les enjeux, écouté différents avis et mûrement réfléchi.
Mais là non plus, je ne peux juger, hélas. Dans le contexte actuel de la France qui décline à grande vitesse, pris dans les affres de la peur de l’avenir, dans le stress d’un travail toujours davantage sous pression en raison d’une économie moribonde, dans la pression financière quotidienne des obligations de la vie courante, dans la tension sociale d’une société qui se désagrège, dans le marasme explosif d’une nation tiraillée et qui ne se reconnait plus, les français n’ont guère le temps ni l’envie. Dans mon entourage, on me remercie souvent pour ce que je fais au sein des Goys en me disant: « J’aimerais pouvoir réfléchir et lire autant que toi sur ce sujet mais j’ai la pédiatre de mon fils à telle heure, le boulot à telle heure, ma fille à aller chercher à la danse, et j’ai le voisin qui me harcèle avec le droit de passage sur son terrain depuis 3 ans et j’ai mon patron qui me met une pression dingue parce qu’il ne s’est pas payé de salaire depuis 3 mois parce que plus rien ne rentre et je sais pas comment je vais payer mes impôts et ma sœur est au chômage depuis 1 an et ça me casse le moral, etc. »
Alors quand quelqu’un se présente avec des solutions qui paraissent toutes simples même si, dans les faits, elles ne seraient qu’un renforcement de tout ce qui va déjà très mal en France, beaucoup de citoyens souscrivent et votent, sans même savoir réellement de quoi il retourne, soit par épuisement moral qui conduit à l’apparente facilité, soit par épuisement moral qui conduit à un sabordage en règle dans l’espoir de pouvoir rebâtir.
Donc, ce premier tour des élections régionales, un 6 décembre, veille de l’anniversaire de Pearl Harbor, est-il un Pearl Harbor électoral où les fascistes attaquent la démocratie ?
Non, hélas, c’est un sabordage de la flotte en rade de Toulon, où les électeurs désabusés, mal dirigés, trompés par leurs chefs et désespérés, mettent à mort leur splendide pays et ses fabuleux atouts, dans la honte et le déshonneur. Certains tenteront, ils le font déjà, de maquiller cela en un splendide acte d’héroïque résistance. Ça ne cachera pas la misère de décennies de leadership foireux, d’idéologies idiotes, de chefs qui n’auraient jamais dû atteindre des postes à responsabilité et de citoyens qui ont joué ce jeu funeste tout en s’en plaignant par ailleurs. Relever la France est possible. Mais il faudra bien plus qu’un bulletin dans une urne. Il faudra du courage, de l’engagement, de l’abnégation, de l’intelligence, du désintéressement, du pragmatisme et surtout un attachement ferme et non-négociable aux valeurs de liberté, à la fois personnelle et économique, d’égalité de chacun devant le droit, sans passe-droits ni copinages, de fraternité, au sens chrétien du terme, c’est à dire qui est capable de se mettre en danger pour sauver ses semblables.
Et ça ne viendra pas d’en haut ! Ca ne viendra pas d’un Pape, d’un Roi, d’un Empereur, d’un Maréchal, d’un Président du Conseil ou d’un Président de la République. Cela viendra de chacun de nous, les citoyens libres, égaux et fraternels qui veulent le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple, d’une France authentiquement libre, authentiquement démocratique et authentiquement d’Etat de Droit.
Si certains se demandent qu’est-ce que tout ceci a à voir avec la défense d’Israël, je réponds : lorsque la France sera enfin ce que je viens de décrire ou même si elle s’en rapproche, les Goys pourront fermer boutique parce que la France et les Français soutiendront naturellement Israël.
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Pug
Pas mieux.
Ce qui est paradoxal, c’est de voir ceux qui utilisent tout le vocabulaire inhérent à une catastrophe mondiale imposer le retrait à leurs candidats en punissant par la même occasion leurs électeurs qui n’auront aucun représentant régional pendant 6 longues années. Alors parler de « résistance » en jetant l’éponge est pour le moins surprenant…